Quand est-ce que Bébé fait ses nuits ?
Entre les nuits hachées, les réveils imprévisibles et la fatigue qui s’accumule, le sommeil de Bébé peut aisément devenir l’un des premiers sujets obsédants de la parentalité. “Est-ce qu’il fait ses nuits ?” Derrière cette formule anodine qui revient sans cesse se cachent de lourdes attentes familiales, sociales et culturelles. Le parent moderne, informé mais épuisé, cherche un équilibre impossible. Il devrait respecter le rythme de l’enfant, tout en préservant sa vie sociale et amoureuse, sa productivité au travail et, bien sûr, sa santé mentale.
Ce décalage entre les besoins physiologiques du nourrisson et les exigences de la vie adulte crée un terrain fertile pour les conseils contradictoires, les méthodes controversées… et la culpabilité.
Pourtant, comprendre ce qu’est réellement “faire ses nuits” et repérer les signaux de progression permet souvent de dédramatiser et d’accompagner son enfant vraiment, étape par étape, avec plus de sérénité.
Faire ses nuits : c’est quoi et ça vient quand ?
Jeune maman pour la première fois, confrontée à un enfant de plus d’un an qui ne faisait pas ses nuits et aux questions de la famille, des collègues ou du pédiatre, j’ai longuement cherché la réponse à ces questions. C’est ainsi que j’ai trouvé une étude publiée par l’Académie Américaine de Pédiatrie fin 2010 sur le sujet. Elle se penche précisément sur la consolidation du sommeil nocturne au cours de la première année.
Elle propose trois définitions possibles de ce qu’on appelle « faire ses nuits » et les auteurs privilégient celle de « dormir sans interruption de 22h à 6h » (Criterion 3 dans le graphique ci-dessous). En effet, c’est celle qui correspond le mieux à la réalité des familles. C’est globalement le moment où les parents se disent que oui, leur bébé fait ses nuits.
L’étude constate que la consolidation du sommeil est très rapide de la naissance à 4 mois puis se poursuit plus lentement au fil de la première année. Aucun bébé d’un mois ou moins ne faisait ses nuits. Puis 45% des bébés de 4 mois et 65% des enfants d’un an les faisaient. C’est ce que montre le graphique ci-dessous :

Il y a une tendance naturelle, physiologique à la consolidation du sommeil dans la phase des 0-4 mois. Alors pourquoi certains enfants font leurs nuits tôt et d’autres pas du tout ? Y’a-t-il d’autres éléments que son développement normal qui jouent pour que Bébé fasse ses nuits ? Quels sont les prérequis pour que Bébé fasse ses nuits ?
Prérequis n°1 : la maturation physiologique (3-4 mois)
Pour enchaîner de vraies nuits complètes, le rythme physiologique de sommeil/éveil de Bébé doit maturer.
Différenciation jour/nuit
Dès le premier mois, Bébé commence à distinguer le jour de la nuit grâce à des « donneurs de temps« , en premier lieu, l’alternance lumière/obscurité et les interactions avec son entourage. Cette capacité, appelée différenciation jour/nuit, s’appuie sur la maturation de son horloge biologique interne, qui se synchronise peu à peu avec un cycle de 24 heures. Elle reste ensuite synchronisée sur ces 24h grâce à la régularité des donneurs de temps.
Evolution des cycles de sommeil
Ensuite, l’organisation du sommeil de Bébé évolue. D’une part, les cycles de sommeil s’allongent progressivement. Ils durent 45-50 minutes à la naissance et atteignent environ 70 minutes à l’âge d’un an. D’autre part, leur composition évolue.
A la naissance, chaque cycle de sommeil est composé d’abord d’une phase de sommeil agité, et ensuite d’une phase de 20 minutes de sommeil calme. En sommeil agité, le nouveau-né a le corps mou mais a des mouvements aux extrémités et surtout exprime sur son visage toutes les émotions dont l’être humain est capable. C’est là qu’on observe les sourires aux anges qui nous font fondre. En sommeil calme, le corps est replié et il peut y avoir quelques sursauts occasionnels mais pas l’animation du sommeil agité. A la fin d’un cycle, il y a un éveil léger et si rien ne vient perturber le bébé (inconfort, faim), il repart pour un nouveau cycle.
Progressivement, le sommeil agité évolue en sommeil paradoxal et le sommeil calme en sommeil lent léger et profond. Le bébé s’endort d’abord en sommeil agité/paradoxal et vers 9 mois, il commence à s’endormir en sommeil lent, comme les adultes.

par l’Institut National du Sommeil et de la Vigilance (INSV)
Allongement du temps d’éveil en journée
Enfin, les temps d’éveil en journée s’allongent. Autour de 15 jours de vie, Bébé, qui ne faisait que dormir (ou réclamer à manger) depuis sa naissance, commence à avoir de véritables phases d’éveil. Elles ne durent que quelques minutes au début. Puis ces phases d’éveil s’allongent progressivement jusqu’à durer d’un repas au suivant, d’abord une fois puis quelques fois par jour. A mesure que le bébé consolide son éveil diurne, il consolide aussi son sommeil nocturne.
Prérequis n°2 : un contexte fiable
Si la maturation physiologique est la base, elle ne suffit pas à elle seule. Pour que cette consolidation du sommeil s’installe durablement, Bébé a aussi besoin d’un cadre cohérent et prévisible. Autrement dit : un environnement régulier.
Le premier pilier, ce sont des repas suffisants et bien répartis en journée. Un bébé qui a couvert ses besoins caloriques entre le matin et le soir aura moins besoin de se réveiller la nuit pour compléter. Concrètement, il s’agit juste d’éviter que Bébé s’endorme pendant le repas en interagissant avec lui pendant la tétée / le biberon et proposer des repas réguliers pour éviter les « trous » dans les apports.
Deuxième pilier : des repères temporels clairs et réguliers. Comme on l’a vu plus haut, l’horloge biologique de Bébé se synchronise grâce à la lumière du jour, aux moments de contact et à l’organisation de ses journées. enchaîner les moments de la journée dans un ordre régulier : réveil, change, repas, interactions/jeu/activité puis endormissement à des horaires proches d’un jour à l’autre aide réellement à caler son rythme interne.
Enfin, un temps d’éveil suffisant et riche en journée soutient la qualité du sommeil la nuit. Quand Bébé commence à rester éveillé plus longtemps, il est important de nourrir ces phases d’éveil par des stimulations variées : paroles, chansons, tapis, balade… Cela aide à construire un contraste net entre jour et nuit, éveil et sommeil, calme et activité qui facilite l’endormissement quand la fatigue revient.
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Prérequis n°3 : l’endormissement autonome
Tous les bébés apprennent à s’endormir seuls à un moment donné. Et c’est crucial, car sans cette compétence, il ne peuvent pas non plus se rendormir seul lors des éveils nocturnes entre deux cycles, ce qui a lieu toutes les heures environ (entre 45 minutes à la naissance et 70 minutes à un an).
Pour certains, cela se fait spontanément, sans que les parents aient le sentiment d’avoir eu à intervenir. Pour d’autres, ce passage demande un peu plus de temps, de présence ou d’ajustements dans l’environnement. Voyons les indispensables à assurer pour que cette acquisition se produise.
Instaurer un rituel du coucher
Instaurer un rituel du coucher simple et régulier aide à préparer Bébé à la séparation nocturne. Il s’agit de quelques gestes répétés dans le même ordre (lumière tamisée, câlin, petite chanson, phrase repère…) et adaptés à l’âge de Bébé, aux appétences des parents (tout le monde n’aime pas chanter une berceuse ou plus tard lire une histoire 😉 ) et à la configuration de la famille et du logement. Ce rituel est donc vraiment propre à chacun et peut être très court. Son rôle est simplement d’être un « donneur de temps » pour Bébé qui peut alors reconnaître que c’est l’heure de dormir.
Régulièrement coucher Bébé encore éveillé
Ensuite, régulièrement coucher Bébé encore éveillé est central. S’il s’endort systématiquement dans les bras, en portage ou en poussette, il ne pourra pas se rendormir sans être bercé. Et les parents devront alors intervenir. Ce coucher éveillé n’a pas besoin d’être systématique. Pour que Bébé puisse apprendre, l’idéal est qu’il ait au moins une occasion de s’endormir dans son lit chaque jour.
Minimiser les interventions nocturnes
Enfin, il faut ajuster les interventions nocturnes. Réagir systématiquement à chaque micro-réveil nocturne peut interrompre un processus de rendormissement fragile en cours. En revanche, écouter quelques secondes avant d’intervenir donne cette opportunité à Bébé de se rendormir seul. Et s’il faut intervenir (pour un repas, un change), il faut limiter les stimulations. On chuchote, on tamise la lumière s’il faut l’allumer, on limite les interactions. C’est un temps de sommeil, donc on préserve le calme.
Ritualiser le coucher, régulièrement coucher Bébé éveillé et limiter les interventions au strict nécessaire la nuit sont trois prérequis pour permettre à Bébé d’acquérir l’endormissement autonome.
Vers la mise en place des nuits complètes ?
Les signes annonciateurs
Après des semaines de sommeil fragmenté, il arrive un moment où les nuits complètes commencent à apparaître, parfois d’une nuit à l’autre. Voici les premiers signes que les réveils nocturnes sont en train de devenir moins nécessaires.
Le premier indicateur est la disparition du dernier repas nocturne. Bébé commence à sauter occasionnellement cette tétée ou ce biberon de milieu de nuit. Bravo ! Cela montre qu’il parvient à couvrir ses besoins alimentaires en journée.
Autre indice, une bonne fatigue en fin de journée. Après une journée riche et fatigante, Bébé commence à manifester franchement sa fatigue : yeux rouges, bâillements, frottement des yeux, bébé qui détourne le regard, surtout chez les nourrissons, regard dans le vide, bébé qui râle ou même pleure. L’idéal est de réussir à le coucher avant qu’il ne s’énerve. A votre sens de l’observation !
Enfin, lorsque l’endormissement autonome devient plus fréquent, même une fois par jour, cela ouvre la voie à une vraie continuité nocturne. Comme expliqué plus haut, avec la capacité de s’endormir seul en début de nuit vient celle de se rendormir seul entre deux cycles au milieu de la nuit.
Ces signaux annoncent que Bébé est en bonne voie. La bascule vers des nuits complètes peut alors se faire en quelques jours, parfois entrecoupés de retours temporaires à des réveils nocturnes. C’est normal, ne vous découragez pas ! Une séquence de 3 ou 4 nuits complètes consécutives est souvent un bon indicateur que le cap est franchi. En tant que parents, repérer ces étapes permet de retrouver un peu d’espoir… et d’énergie !

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Comment favoriser l’installation des nuits complètes ?
Quand on parle de favoriser la mise en place des nuits complètes, il ne s’agit ni d’appliquer une recette magique, ni de forcer son bébé pour préserver le confort des parents. On parle simplement de créer un cadre propice pour la consolidation du sommeil nocturne de Bébé, qui est naturellement en train d’avoir lieu. Voici quelques trucs qu’on peut faire pour aider donc :
- Mettre en place une vraie alternance jour/nuit dès la naissance : lumière, activité, interactions en journée ; obscurité, calme, rituels doux la nuit. Cela soutient la maturation de l’horloge biologique évoquée plus haut.
- S’assurer que les besoins nutritionnels sont couverts en journée : proposer les repas à intervalles réguliers (toutes les 3 à 4 heures environ), vérifier qu’ils sont complets, et éviter que Bébé ne “tétouille” sans vraiment se nourrir lors des repas (à distinguer des tétées de réconfort pour les bébés allaités).
- Offrir à Bébé des occasions fréquentes de s’endormir dans son lit : cela ne doit pas être une contrainte rigide, mais une habitude régulière. Moins l’endormissement dépend de conditions spécifiques (bercement, portage), plus l’endormissement peut devenir autonome.
- Observer avant d’intervenir la nuit : beaucoup de réveils sont en fait des micro-éveils entre deux cycles. Attendre quelques secondes peut suffire pour que Bébé se rendorme seul.
- Limiter les stimulations quand une intervention est nécessaire : lumière tamisée, gestes doux, peu de paroles… pour ne pas réveiller davantage Bébé (et vous).
- Suivre l’évolution du rythme de Bébé avec une appli de suivi (BabyTracker, May ou autre) peut aider à y voir clair. Quand on manque de sommeil et qu’il se fait hacher menu, les nuits et les jours se brouillent. Ces données objectives deviennent alors précieuses pour repérer les vraies tendances.
Conclusion
“Ton bébé fait ses nuits ou pas encore ? Il a quel âge ?” Voilà une question de conversation banale, et le plus souvent bien intentionnée et compatissante, qui peut hérisser toute la frustration de jeunes parents en manque de sommeil.
Ils sont aujourd’hui dans une situation impossible. Il faudrait accompagner son enfant à son rythme, sans jamais le laisser pleurer, quitte à ne pas dormir de la nuit, mais rester au top en journée. Et comme si ça ne suffisait pas, il faut aussi écouter ou chercher des conseils contradictoires… et pas toujours opérationnels !
De fait, on croit souvent que retrouver des nuits complètes après la naissance de Bébé est quelque chose qui nous échappe, sauf si on accepte d’appliquer la bonne vieille méthode du “laisser pleurer”.
Et pourtant, lorsque l’on connaît les facteurs favorisant la consolidation du sommeil d’un nouveau-né, des leviers commencent à apparaître pour accompagner Bébé dans cette direction. Il n’y a plus qu’à les mettre en place pour que toute la famille retrouve des nuits reposantes et passe du même coup de meilleures journées.
BB1 a fait ses nuits à 15 mois, et BB2 à 3 mois.
La différence ?
Nous.
Nous avons vécu ça très fort avec notre premier. Je vous en parle ici si vous voulez !
A lire si vous êtes jeune parent
Quand est-ce que Bébé fait ses nuits ? FAQ
Vers 3-4 mois, la plupart des bébés sont physiologiquement aptes à faire des nuits complètes. En pratique, environ un bébé de 4 mois sur deux dort sans interruption de 22h à 6h. Avant cela, les nuits complètes sont rares.
Cela dépend de nombreux facteurs : la maturation naturelle du sommeil, mais aussi l’environnement. Une alternance claire jour/nuit, des repas suffisants le jour et un rythme quotidien régulier jouent beaucoup.
Oui, c’est fréquent. À cet âge, près d’un bébé sur deux se réveille encore la nuit. Chaque enfant avance à son rythme et vous ne pouvez que créer l’environnement qui favorise les nuits complètes.
Trois indices à guetter : Bébé saute parfois le repas de nuit, il montre une vraie fatigue le soir, et il commence à s’endormir seul. C’est souvent le début d’un meilleur sommeil nocturne.
En rythmant ses journées : lumière, bruit et interactions en journée ; calme, obscurité et rituels doux la nuit. Cela aide son horloge biologique à se régler naturellement.
Pas toujours. Si Bébé mange bien dans la journée, il n’a plus forcément besoin de repas nocturne. Mais s’il réclame clairement, on peut lui proposer un biberon ou une tétée, sans trop le stimuler.
Non. Attendre un peu permet parfois à Bébé de retrouver le sommeil sans aide. Et si on intervient, mieux vaut le faire dans le noir, doucement et sans trop parler.
En patientant quelques secondes. Beaucoup de réveils sont de simples transitions entre deux cycles. Sans inconfort, Bébé peut souvent se rendormir tout seul.
Oui, c’est une acquisition naturelle. Certains y arrivent tôt, d’autres plus tard. Un cadre stable et des rituels simples facilitent ce processus.
Oui, des applis comme BabyTracker ou May permettent de noter les repas, les siestes et les nuits. Pratique pour repérer les vrais rythmes quand on est épuisé.
Mes sources
American Academy of Pediatrics
- Jacqueline M. T. HENDERSON, Karyn G. FRANCE, Joseph L. OWENS, Neville M. BLAMPIED. Article « Sleeping through the night: the consolidation of self-regulated sleep across the first year of life », novembre 2010 – L’échantillon de l’étude compte 75 enfants néo-zélandais, ce qui est trop faible pour faire des conclusions de cette étude une règle absolue. Cela reste à mon sens plus instructif que de s’appuyer sur les exemples de son entourage proche, qui se comptent le plus souvent sur les doigts de la main ou presque.
Institut National du Sommeil et de la Vigilance (INSV) & Candide Baby Group
- Le Sommeil de 0 à 3 ans, décembre 2018
Institut National du Sommeil et de la Vigilance (INSV)
- Comment le sommeil évolue avec l’âge ? [Page consultée le 23/07/2025]
- Sommeil de l’enfant [Page consultée le 23/07/2025]
Réseau Morphée
- Le sommeil de l’enfant [Page consultée le 23/07/2025]
- Sommeil normal du bébé : de la naissance à 3 ans [Page consultée le 23/07/2025]
Esthel O.
- Les secrets d’un sommeil autonome. [Ebook auto-publié en 2021 sur reverseveiller.com]
- Donner un rythme à bébé de 0 à 6 mois. [PDF partagé en 2020 sur reverseveiller.com]
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