Allaiter s’apprend : le B-A-BA

Allaiter, c’est naturel…” Marcher aussi, me direz-vous… ce n’est pas pour autant qu’on n’a pas besoin d’apprendre ! Ce malentendu est une plaie, au sens propre comme au figuré lorsque l’on pense aux crevasses. Allaiter s’apprend donc.

Et si c’est la première fois que vous allaitez, vous devez au même moment apprendre à allaiter et mettre en place un allaitement. Voici donc quelques basiques pour démarrer tout cela.

Une capacité innée vs. un acte appris

Naturel, inné, acquis ?

Pour rassurer ou pour convaincre les futures potentielles allaitantes, beaucoup sont tentés d’utiliser le “allaiter, c’est naturel”. Or, ce “naturel” est assez flou pour créer un doute sur le fait qu’allaiter s’apprend.

Allaiter est une capacité innée, en effet, de la femme homo sapiens. En tant que mammifère, la femme peut naturellement nourrir son petit de son lait. Les prérequis physiologiques se mettent en place au cours de la grossesse, la lactation se déclenche avec l’accouchement et les tétées des premiers jours du post-partum et le nouveau-né tête d’instinct (réflexe de fouissement et succion).

Toutefois, les gestes efficaces de l’allaitement, eux, s’apprennent. Il s’agit de :

  • trouver une position confortable dans la durée pour les deux protagonistes,
  • correctement placer la bouche de Bébé sur le sein,
  • sécuriser la bonne prise de lait par le bébé,
  • etc.
Première mise au sein d'un nouveau-né
Première tétée toute en concentration pour une bonne mise au sein
Crédit photo : Rachel Coleman

L’importance de faire la place à l’apprentissage

Pour ma part, j’ai découvert la maternité et l’allaitement lors du premier confinement du printemps 2020. Mon cours de préparation à la naissance sur l’allaitement a été supprimé dans ce contexte. Puis lors du séjour en suite de couches, le personnel s’est avéré débordé et n’a pas pu m’apporter l’accompagnement nécessaire. Quatre semaines de crevasses douloureuses à en pleurer ont failli avoir raison de ce premier allaitement.

Cette épreuve m’a menée a être très attentive à ce qui marche ou non. Je livre dans cet article les essentiels à connaître absolument pour pouvoir bien démarrer son allaitement. En complément, je ne peux que vous recommander de vous renseigner auprès des personnes qui suivent votre grossesse, de vos proches, etc.

Le lancement de l’allaitement peut être l’une des épreuves du début du post-partum mais la fatigue extrême, l’extraordinaire de vivre avec un nouveau-né et la découverte de s’occuper de sa progéniture en sont d’autres. Et elle vous envoient souvent dans les cordes. Si vous voulez éviter le KO, je vous envoie très volontiers nos 8 meilleurs conseils pour traverser les débuts du post-partum.

Je vous envoie ça ?

Allaiter s’apprend : quelques fondamentaux

Allaiter s’apprend, alors je vais commencer par quelques points de repères généraux sur la lactation et l’allaitement.

… de la lactation

  • L’offre est fonction de la demande, la lactation est fonction de la succion du bébé*. Une bonne succion (forte et fréquente) est clé pour la bonne mise en place de la lactation. Les problèmes d’insuffisance de la lactation ont plus souvent des causes opérationnelles que physiologiques**. Si vous semblez manquer de lait alors que vous souhaitez allaiter, demandez conseil rapidement (sous 24-48 h) à la PMI, à une sage-femme ou à une consultante en lactation. Les solutions sont souvent simples à mettre en Å“uvre pour stimuler la lactation mais elles nécessitent une réaction rapide.
  • La lactation s’adapte très rapidement (dans mon expérience, en 24 à 48 h) à la consommation du bébé. Chaque tétée déclenche la production du lait dans les heures qui suivent. Plus le sein est vidé, plus il produit de lait après la tétée. Le rythme de production est le plus élevé juste après la tétée et ralentit progressivement à mesure que les heures passent.
  • Le lait maternel est très sucré. Vous vous en rendrez compte si vous le goûtez ou lors des fuites : le lait colle quand il sèche.
  • Le lait produit par vos deux seins n’est pas exactement le même, il peut y avoir des différences d’aspect et de goût.
  • La nature du lait varie au cours de la tétée. En début de tétée, le lait est plus clair, plus plein d’eau. Il hydrate plus qu’il ne nourrit. À mesure que la tétée progresse, il s’enrichit, s’opacifie. Il nourrit plus qu’il n’hydrate.
  • La composition du lait varie dans le temps. Il contient plus de mélatonine la nuit, une hormone qui aide Bébé à dormir. Le lait s’adapte également aux besoins nutritionnels de votre enfant à mesure qu’il grandit.

… et de l’allaitement

  • Allaiter n’est pas censé être douloureux, à l’exception éventuelle des premières secondes de tétée. S’il y a une douleur, c’est le signal que quelque chose ne fonctionne pas. Il faut arrêter la tétée et changer quelque chose.
  • Lors de la tétée, la bouche du bébé fonctionne comme une ventouse qui se positionne sur le sein. Lorsque le bébé ouvre ensuite la bouche, il crée un vide qui pompe le lait hors du sein, puis il avale le lait extrait et recommence. Pour interrompre la tétée, il ne faut donc jamais éloigner directement le bébé du sein ou le sein du bébé au risque de tirer d’autant sur le mamelon. Il faut au contraire glisser un doigt à la commissure des lèvres du bébé pour rompre l’effet ventouse et ensuite retirer le mamelon de sa bouche.
  • Lorsque le bébé tète, on l’entend et/ou on le voit déglutir. Le son est un petit claquement et alterne avec les respirations. Chez certains bébés, c’est tout à fait notable ; chez d’autres, beaucoup plus discret. Prendre l’habitude de surveiller la déglutition vous permettra d’évaluer si la tétée se passe bien / comme d’habitude.
  • Le bébé peut somnoler voire s’endormir au sein pendant la tétée.
  • Le bébé traverse des pics de croissance pendant 24 à 72 h autour de 3, 6 et 9 semaines puis vers 3 et 6 mois. Pendant ces pics de croissance, sa consommation augmente. Il tête plus à chaque tétée et plus souvent. Les seins semblent continuellement vides. Il ne faut pas croire à ce moment-là que votre lactation est devenue insuffisante. C’est très temporaire et la production de vos seins est déjà en train de s’adapter à la demande augmentée.

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Maintenant que vous connaissez quelques principes, passons à la pratique. A mon sens, on a besoin de très peu de choses pour allaiter, l’essentiel est d’être confortablement installée. Alors comment faire ?

S’équiper, s’installer

  • Vu le temps que représente l’allaitement sur 24 h, trouver une position confortable est clé.
  • Vu la fréquence à laquelle vous allaiterez et pour faciliter le fait de proposer, il est également crucial d’avoir une garde-robe adaptée. A mon sens, l’idéal est de trouver des soutiens-gorge ou brassières en coton, souples et peu chers de deux tailles supérieures à celle de la poitrine en fin de grossesse afin d’être sûre d’avoir quelque chose dès les premiers jours, quitte à ajuster par la suite. Tous les hauts qui libèrent la poitrine facilement et sans la serrer fonctionnent.
  • Le temps que l’allaitement se rode, vous aurez certainement des fuites de lait, dans le meilleur des cas pendant la tétée, par le sein qui n’est pas tété, dans le pire des cas, à tout moment de la journée. Il est utile d’avoir à portée de main des cotons absorbants si c’est rare et des coussinets d’allaitement si c’est régulier. On en trouve au supermarché et en pharmacie.
  • Allaiter donne soif. Il est très utile d’avoir une bouteille d’eau ou une boisson chaude à portée de main lorsque vous donnez le sein.
  • La mise au sein est le geste qui conditionne la qualité de la tétée dans la durée. Elle se fait en trois temps (installer Bébé / former le sein / mettre Bébé au sein) et il faut la reprendre du début au moindre doute ou si une douleur persiste. Vous allez tous les deux devenir meilleurs dans le geste à mesure que les occasions se multiplient.

Vous l’avez compris, allaiter s’apprend autant pour Maman que pour Bébé. Cela fait déjà beaucoup de choses à avoir en tête et pourtant, vous avez une mission parallèle à votre apprentissage : mettre en place l’allaitement pour qu’il puisse durer. Nous reparlerons sûrement de (l’injonction à) l’allaitement long, ici, ce qui compte pour moi est que vous ayez la possibilité de faire un choix. Cela implique que l’allaitement ne périclite pas instantanément. Comment faire cela ?

Mettre en place l’allaitement

  • La mise en place de l’allaitement est unique au duo maman-bébé, il faut s’adapter à ce qui se passe.
  • Il ne faut pas négocier sur la mise au sein et la qualité de la tétée. Elles doivent être bonnes pour que l’allaitement se lance bien. Il faudra porter une attention particulière aux tétées de nuit : vous serez tentée de tolérer plus de choses et risquez de le regretter les jours qui suivent.
  • A la naissance, l’idéal est de donner le sein aux premiers signes d’éveil et de réveiller Bébé au bout d’un certain temps sans téter. Les professionnels qui vous entourent vous donneront la fréquence à respecter dans votre cas (le plus souvent entre 2h30 et 4h). Rapidement, vous pourrez passer sur un allaitement “à la demande”, puis à horaires à peu près fixes, si vous le souhaitez.
  • Il existe plusieurs positions de tétée, chaque duo maman-bébé a ses préférences et ses adaptations personnelles. Cela vaut la peine d’explorer les différentes positions pour élargir le champ des possibles et notamment se reposer allongée en allaitant, ne pas fatiguer toujours les mêmes muscles des épaules et des bras, éviter les crispations de la nuque ou du dos du bébé, etc.

Allaiter s’apprend, et ensuite ?

Vous avez réussi et trouvé votre équilibre à vous dans l’allaitement ? Félicitations !

Quelle étape ! Une fois l’alimentation bien mise en place, il devient possible de préparer voire commencer à guider Bébé vers un sommeil autonome et des nuits complètes pour toute la famille. Ca sonne comme une délivrance ? Je partage ce qui a fait des miracles pour nous alors que nous étions tous complètement épuisés. Solutions pragmatiques et résultats à portée de main. 😉 Bonne lecture !

A lire sur l’allaitement

Mes sources

*Campus numérique de maïeutique Cerimes – Cours « Physiologie de la lactation Â»
Concernant l’ajustement de l’offre et la demande en matière de lactation. On parle de mécanisme de contrôle autocrine de la production de lait quand on évoque celui où la production de lait s’adapte à la consommation par le bébé. Un second mécanisme de contrôle de la production de lait, dit endocrine, se base sur la prolactine produite par l’hypothalamus de la mère.

**Gisèle GREMMO-FEGER. Article de présentation du dossier « Allaitement maternel : l’insuffisance de lait est un mythe culturellement construit Â», 2003

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