Une gastro pas comme les autres

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Il y a dix jours, ma fille de 3 ans et 3 mois a eu la gastro. Rien de spécial en cette saison. Elle s’est mise à vomir au centre de loisirs le mercredi en fin de journée. Rien de spécial là non plus : depuis toute petite, elle vomit facilement au moindre virus.

Sauf que 36h plus tard, il n’y avait pas d’amélioration notable. Elle vomissait toujours tout ce qu’elle avalait et commençait à être sérieusement abattue. J’ai appelé le SAMU pour savoir quoi faire et la réponse du médecin régulateur a été simple. “A cet âge, s’ils vomissent tout ce qu’ils prennent, y’a rien d’autre à faire que de les perfuser. Allez en pédia [= aux urgences pédiatriques].

S’en sont suivis deux jours en unité mère-enfant et ce séjour m’a quelque peu chamboulée. P’tite Nana s’est remise, a retrouvé son pétillant habituel (comprenez : toute la mignonnerie… et tous les caprices qu’un enfant de cet âge est capable de mettre en scène à la minute 😉 ) et a repris l’école le mardi suivant.

De mon côté, j’ai eu besoin de 48h de plus pour digérer tout ça. Maintenant que c’est fait, je vous livre les principales réflexions que cette expérience m’a amenées.

Des soins et de l'humain : 48h en unité mère-enfant. Illustration d'une petite fille couchée dans un lit d'hôpital avec son doudou et une perfusion

Quelle chance incroyable on a aujourd’hui

Pendant tout le séjour, j’ai été très calme, concentrée sur les prochaines étapes, les priorités, l’accompagnement à donner à P’tite Nana. Divertir pendant les soins désagréables, expliquer les examens et la situation, passer le temps… C’est lorsque je n’ai plus été la seule adulte responsable à ses côtés que j’ai senti le poids que j’avais porté.

Et ma première réflexion a été : qu’est-ce qui se serait passé si nous n’avions pas eu cette perfusion ? P’tite Nana était déshydratée et en hypoglycémie. Elle était rentrée dans un cercle vicieux où, parce qu’elle était à jeun, elle continuait de vomir, restait donc à jeun et ne pouvait pas reprendre des forces. Inutile de vous faire le dessin d’où nous allions sans cette perfusion.

Mais ce dessin, je me le suis fait.

Et j’ai mesuré l’immense chance que nous avons aujourd’hui. D’avoir les connaissances, la technique et l’organisation sociétale qui m’a permis de joindre un médecin compétent en quelques minutes, d’aller à l’hôpital à 20 minutes et d’avoir cette perfusion qui l’a remise en état de s’alimenter en 24h. Le tout sans payer un centime le jour où j’ai besoin de ces services.

La situation aurait pu être dramatique. Dans les faits, elle a simplement été pénible. Les situations comme celles-ci sont celles qui me font avoir en horreur la petite phrase “c’était mieux avant”. (Pour l’anecdote, c’est tellement vrai que j’ai un autre site qui s’appelle Ce sera mieux après !)

Avoir des enfants rend vulnérable

La naissance de P’tit Gars, notre aîné, m’avait déjà montré comment avoir un enfant revisite de fond en combles son rapport à la mort et à la douleur. J’y ai dédié un chapitre dans mon livre Bref, tu vas devenir parent ! tant cela a marqué un avant et un après pour moi, tant cela me semble inhérent à l’expérience d’accueillir un (premier) enfant.

Ce passage par l’hôpital m’a rappelé la vulnérabilité qu’on accepte (en pleine conscience… ou non) en devenant parent. La deuxième réflexion que je me suis faite était que : je ne sais pas.

Faire avec les moyens du bord

A ce moment-là, nous n’étions pas sûrs de ce qu’il fallait faire mais on faisait au mieux. On avait en tête que lorsqu’on vomit (comme en cas de diarrhée), on se déshydrate et il faut boire beaucoup pour compenser. Je sais qu’avoir trop chaud peut donner la nausée. On essayait de lui donner à manger des choses sans trop de goût (riz, pâtes sans sauce, cornflakes). Et je suis allée dormir avec elle pour l’aider pendant les deux nuits compliquées à la maison.

Mais quand j’ai appelé le SAMU le vendredi matin, c’était parce que ça dépassait nos compétences. On ne comprenait pas pourquoi elle continuait de vomir.

Nota bene : Si, comme moi il y a encore quelques semaines seulement, vous pensiez que le 15, c’est pour les urgences vitales uniquement, sachez que le SAMU joue aussi un rôle de régulation, notamment pour limiter l’accès aux urgences des hôpitaux et orienter efficacement les gens qui appellent.

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Je vous envoie ça ?

Savoir qu’on ne sait pas

Aux urgences pédiatriques, j’ai découvert les interactions entre l’acétone et le glucose. L’acétone augmente à jeun et donne envie de vomir quand elle est en trop grande quantité dans le corps. Quant au glucose, il fait redescendre l’acétone et coupe les nausées.

Si nous l’avions su avant, nous aurions tout de suite pu tenter de donner une sucette et du jus de pomme plutôt que de l’eau à P’tite Nana. Ce sont les premières choses qu’ils ont faites aux urgences pédiatriques (en plus de lui préparer une solution de réhydratation orale, mais ça, on savait déjà que P’tite Nana rechigne à la boire à cause du goût).

C’était si simple. Pour cette fois, on a appris. Et ça sera d’autant plus utile que la situation pourrait se représenter, vu la propension de P’tite Nana à vomir lorsqu’elle est malade.

Mais quid des autres cas ? Quid de toutes les autres choses simples et hyper pertinentes qu’on ne sait pas et qui nous feront laisser nos p’tits loulous souffrir un peu plus, un peu plus longtemps que nécessaire ?

On est démuni et on le sait. On sait qu’on ne sait pas assez. On se sent vulnérable.


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Séjourner à l’hôpital est un vrai défi

Ce séjour à l’hôpital m’a énormément rappelé mes deux séjours à la maternité et le fait que je les ai assez mal vécus.

Un monde à part

Rester à l’hôpital, c’est un peu être dans un autre monde.

Pour l’anecdote, plusieurs soignants ont évoqué avec nous notre sortie à “samedi soir”. A mesure que les heures passaient, j’attendais des précisions pour qu’on puisse être un peu plus concrets. Je voulais notamment tenir mes parents au courant de l’heure à laquelle on pourrait récupérer P’tit Gars. Et on voulait aussi savoir comment on organiserait le dîner, d’autant plus que le frigo était vide sans les courses de la semaine. Vers 14h samedi, je finis donc par poser la question : “Le soir, c’est quelle heure environ ? plutôt 18h, plutôt 20h ?”. Réponse : “Ah, peut-être vers 16h30-17h.”

Bon, je ne sais pas vous, mais pour moi, 16h30-17h, ce n’est pas « le soir”. On est en plein dans le sujet avec les enfants, surtout avec les jours qui rallongent. Et vraiment, ce n’est pas sur cet horaire là qu’il y a des ambiguïtés !

Plus sérieusement, il y a forcément une raison pour laquelle les choses ont été formulées ainsi. Nous faisons l’hypothèse que c’est lié à l’organisation des gardes et la rotation des équipes 24h/24.

Un contexte pénible

Les autres éléments qui rendent le séjour difficile à mon sens sont :

  • La restriction de liberté de mouvement : globalement, on ne sort pas de la chambre, et encore moins du bâtiment, sans avis médical favorable. Sans compter les fils branchés de partout. Je n’avais pas aimé ça à la maternité, je ne pouvais que compatir avec ma fille qui pleurait pour les enlever.
  • La multiplicité et l’anonymat des interlocuteurs : les métiers sont nombreux, les équipes se renouvellent 2 à 3 fois par jour, les masques n’aident pas à reconnaître les soignants. Plusieurs fois, je me suis demandé “C’est la même personne que tout à l’heure ?”. Et je ne savais pas toujours parce que je n’ai pas réussi à lire toutes les blouses à chaque passage.
  • Le fait que les soignants essaient d’en dire le moins possible et de ne s’engager sur rien. C’est bien sûr inhérent au sujet médical, complexe, plein d’hypothèses et de probabilités, et chargé d’enjeux. De plus, comme soignant et patient ne se connaissent pas, ils ne peuvent pas adapter leur communication. Mais l’impression d’être volontairement maintenu dans le noir n’aide pas à bien vivre le séjour.
  • L’inconnue sur les prochaines étapes ou sur la prochaine fois qu’un soignant passera.
  • L’inconnue sur des choses pratiques : à quelle heure est servi le plateau repas ? Est-ce qu’on a le droit d’utiliser la salle de jeux ? Où est la “salle des parents” ?
  • Et bien sûr, l’inconfort de n’être pas chez soi, sans ses affaires, de sauter des repas ou des siestes, de ne pas pouvoir régler la climatisation, etc.

Quelques idées pour améliorer les choses

Je ne partage pas ces dernières réflexions pour me plaindre d’une situation « in-to-lé-rable », comme vous l’avez compris dès le début de l’article. 😉 Celles-ci ont plutôt donné lieu à des pensées tournées vers améliorer les choses.

La bientraitance des soignants ne devrait pas relever que de l’empathie individuelle

J’évoque ici des idées que la Dr Amina Yamgnane a développé de manière plus détaillée et plus éclairée que moi, notamment dans son livre Prendre soin des femmes paru en mars 2024. Je ne l’ai pas encore lu, mais plusieurs articles* m’ont donné très envie de lire plus avant cette gynécologue. Elle raconte avoir pris conscience en cours de carrière d’avoir été “maltraitante dans le soin” malgré ses meilleures intentions.

A mon échelle, j’ai constaté que, malgré les meilleures intentions de la plupart des soignants à l’hôpital, les soins sont pénibles. Si en plus, les soignants sont peu sensibles au vécu du patient, la violence n’est plus très loin ou entre carrément en scène. J’en ai ainsi vécu un épisode à la naissance de P’tite Nana.

La bientraitance des patients par les soignants relève pour beaucoup de l’empathie de chacun. Et les personnes qui choisissent ces métiers sont susceptibles d’être particulièrement empathiques. Néanmoins, si les protocoles qu’on enseigne et si les processus selon lesquels on organise les soins ne permettent pas à cette bienveillance de s’exprimer, le résultat ne peut pas être bon.

Dr Amina Yamgnane dit qu’elle a eu un déclic en écoutant des témoignages de femmes victimes de violences gynécologiques. Elle aussi appliquait ces gestes quotidiennement, et consciencieusement de surcroît… parce que c’était ce qu’on lui avait enseigné. Elle souhaitait sincèrement aider les femmes qu’elle soignait. La bientraitance est donc l’affaire de tous, et s’apprend.

Le patient devrait être mieux intégré dans la construction du parcours de soins

En tant que consultante en gestion de projet, j’ai écrit des dizaines de RACI. Cet acronyme barbare cache une réflexion simple. C’est un document qui résume le rôle de chacun dans un processus donné. Qui est Responsable, Acteur, Consulté ou Informé à chaque étape ?

Dans un parcours de soins, le patient est à mon sens en général largement sous-estimé. Il est a minima Acteur, parce que c’est lui qui prend les médicaments et reste assis sur sa chaise quand l’infirmière arrive pour la prise de sang. En réalité, il est souvent même Responsable. Lorsque vous prenez votre rendez-vous annuel chez la sage-femme ou appelez le dentiste pour une douleur dentaire par exemple. Si vous ne faisiez rien, il ne se passerait rien. Vous le faites, même si vous redoutez la fraiseuse ou le frottis, parce que vous êtes responsable de votre santé.

Lors du séjour à l’hôpital, il est rare d’être Consulté, parfois difficile d’être simplement Informé. Informé de la prochaine étape, des conséquences d’un soin ou de son absence, des enjeux à un instant T, de la cause de la situation. Par exemple, j’ai appris qu’il s’agissait d’une gastro-entérite pour P’tite Nana en lisant le compte-rendu d’hospitalisation dans son carnet de santé une heure avant la sortie… et parce que j’ai demandé le sens de l’acronyme GEA ! Nous n’avions parlé jusque là que des conséquences (le fait qu’elle n’arrivait plus à boire ni manger). J’ai aussi soudain mieux compris le sens de l’affichage des règles d’hygiène sur la porte de notre chambre.

Pourtant, même P’tite Nana, du haut de ses 3 ans, était une actrice centrale de sa santé. Elle a accepté de ne pas retirer son monitoring maintenu par un sparadrap sur son gros orteil, sous sa chaussette. Autant vous dire qu’elle aurait pu, et en a été très tentée ! Et elle a refusé de boire la solution de réhydratation orale à chaque fois qu’on l’y a incitée. Le patient, aussi petit soit-il, est au cœur de la construction du parcours de soins.

L’interlocution devrait être fluidifiée

Entre les masques (à quand des masques transparents ?) et les étiquettes nominatives qui disparaissent dans les plis des blouses, il est difficile de reconnaître les soignants. Même le code couleur des blouses ne sert… que si on le connait ! A côté du téléphone interne disponible dans la chambre, il y avait deux numéros, pour appeler tel ou tel métier. Mais j’ai surtout apprécié que soit précisé pour quel type de sujet il fallait appeler : alimentation ou confort d’un côté, perfusion ou médicaments de l’autre.

Que peut-on imaginer pour échanger plus efficacement avec l’équipe ? Une présentation systématique lorsque les soignants arrivent (c’est sûrement l’objectif, mais elle n’est pas systématique) bien sûr. Peut-être une explication, présentée à l’arrivée en chambre et laissée à disposition, sur le mode de fonctionnement du service (code couleur des blouses, horaires des surveillances médicales, des repas et des changements d’équipe, plan du service dans l’hôpital…) ?

La défiance des patients envers les soignants doit cesser

Enfin, à l’heure où on dénonce les violences gynécologiques et obstétricales sur les réseaux sociaux et où les projets de naissance se veulent souvent les plus “naturels” (c’est-à-dire le moins médicalisés) possibles, il y a un sentiment latent de défiance plus ou moins assumé vis-à-vis du corps médical.

Il y a des réalités qu’il ne faut pas négliger. Mais il ne faut pas non plus oublier que l’immense majorité des soignants veut le meilleur pour ses patients, autant physiquement que psychologiquement. Et ce contexte de défiance latente ne peut pas aider les soignants à faire leur travail sereinement, et à donner autant de place que possible au patient et à son accompagnement.

Qu’en retenir ?

Pour ma part, ce séjour à l’hôpital m’a fait revivre, avec surprise, beaucoup de ressentis et de réflexions que j’avais vécus lors de mes deux séjours à la maternité, après les naissances de P’tit Gars et P’tite Nana.

Des séjours que j’ai vécus comme pénibles personnellement mais qui m’ont surtout laissé l’impression de deux mondes, celui des soignants et celui des patients, côte-à-côte, qui se touchent sans se mélanger, ni se comprendre.

Il y aurait tout à gagner à ce que chacun des deux mondes comprenne un peu mieux l’autre, et communique un peu mieux. Pour un meilleur vécu côté patient, pour une meilleure reconnaissance côté soignant et pour une meilleure qualité de soin globale.

Et quoi d’autre ?

De son côté, P’tite Nana retient deux choses de son séjour.

D’abord, l’hôpital, elle n’y reviendra pas de bon gré. Même si les sucettes y sont des médicaments. Même si les gens sont très gentils. Et même s’ils appellent un cathéter un « papillon ».

Ensuite, elle a bien progressé en jeux de cartes. Quand on lui a fait remarquer que le Memory et le Dooble, ce n’était pas le même jeu, elle nous a répondu : « Ben ça ressemble, parce qu’il faut trouver les mêmes ! »

P’tite Nana 1, parents 0 !

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Mes sources

* France Inter, Amina Yamgnane invite à prendre soin des femmes, interview du 11 avril 2024
* Télérama, Amina Yamgnane, gynécologue maltraitante repentie : “Les femmes ont raison d’être en colère”, article du 11 avril 2024

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